1, 2, 3, je cours loin de là. [Pv]

Pour une fois que le temps était clément, il aurait été dommage de ne pas sortir… C’était la pensée qui avait traversé l’esprit d’Abby ce matin là tandis qu’il regardait le ciel par la fenêtre de son dortoir. Ainsi, l’enfant aux cheveux noirs avait rapidement enfilé ses vêtements avant de se poser devant un miroir pour se coiffer. Ce jour-là, le gamin s’était fait deux couettes basses derrière sa tête avec ses élastiques avec les petites fraises en plastique qu’il affectionnait tant. Un cadeau d’une personne qu’il aimait vraiment beaucoup, son ancienne baby-sitter. Malheureusement, il se savait dans l’impossibilité de la voir puisqu’elle résidait encore en Australie. Il avait bien tenté de demander à ses parents la permission de s’y rendre mais la réponse avait été négative… Après tout, Abby n’avait que treize ans et à cet âge là, on ne laisse pas les enfants partir seuls en voyage dans un autre pays. Pourtant, c’était son pays, là où il était né… La nostalgie de ce qu’il considérait comme sa maison pour toujours emplissait son cœur mais il ne pouvait rien y faire. Depuis quelques temps, le pauvre gosse avait encore plus qu’avant de son école… Les gens y avaient changé selon lui, il s’y sentait encore moins à sa place qu’avant… Peut-être parce qu’on l’insultait en permanence d’être de sang-impur, mais était-ce son choix d’être un enfant de moldu ? De toute manière, il ne voulait même pas être un sorcier ! Son souhait était de rester dans son pays, à être auprès de cet abruti de Bryan, à se faire déguiser en fille par sa baby-sitter et sa petite sœur… Il souhaitait pouvoir regarder les étoiles par la fenêtre de sa chambre la nuit et faire de la corde à sauter le jour… C’était un rêve simple mais impossible à réaliser. Alors, il courrait loin de tout… L’adolescent posait ses mains sur ses oreilles pour ne pas entendre les voix des autres élèves de l’école et il fermait les yeux pour ne pas voir leurs sourires moqueurs. Simplement, cela n’arrangeait pas les choses et il savait que jamais il n’aurait sa place dans cette école.

C’est pour ça qu’il traversa la grande salle le plus vite possible ce matin là, serrant sa corde à sauter contre lui et regardant le sol. Les visages des autres lui apparaissait déformés, devenant plus affreux à chaque seconde où il osait regarder. Alors, Abby se mit à marcher plus vite, comme pour se protéger… Parce que le noir était derrière lui et les étoiles droit devant. La sensation de malaise qu’il avait ressentit en courant presque pour traverser la pièce immense disparue à l’instant même où il se retrouva dehors. Le temps n’était peut-être pas sublime, parce que malgré le soleil, on ne pouvait pas vraiment dire que la chaleur était au rendez-vous mais qu’importe. Le gamin ne portait pas de veste mais son fin pull beige lui suffisait amplement… Il marcha le plus loin qu’il put à travers le parc, sans cesser de se retourner pour voir si personne ne le suivait. C’est assez triste d’avoir peur dans le lieu où on passe presque toutes ses journées… Abby avait pourtant fait des efforts, il avait tenté de s’intégrer, en étant gentil avec tout le monde… Mais l’époque et la situation amenait à un rejet plutôt douloureux pour l’enfant.

Dès qu’il fut sûr que plus personne ne pourrait le voir, le gamin prit les bouts de sa corde dans chaque main et se mit à sauter. Sur un rythme qu’il connaissait par cœur, d’abord sur deux pieds puis sur un seul. Le souvenir de la découverte de ses pouvoirs lui revenait sans cesse en tête quand il faisait ce geste. Après tout, le jeune gryffondor avait dut se prendre les pieds dans sa corde pour savoir qu’il était un sorcier… Ses yeux étaient fixés sur le lac un peu plus loin tandis que sa voix très basse se faisait entendre.

« 1, 2, 3 Je cours loin de là. »

Abby savait que ce n’était pas la chanson originale que les petites filles chantonnaient mais il avait aimé la changer, reprendre les choses à sa manière. C’était sa vision des choses, celle d’une personne qui tendait les mains vers les étoiles sans comprendre qu’elles étaient bien trop hautes pour lui.

« 4, 5, 6 Je ne comprend pas leur justice. »

Son incompréhension face au monde était assez complexe à entrevoir mais pouvait être facilement mise sur le compte de son jeune âge. Abby vivait dans une période assez sombre du monde des sorciers. Mais, pour lui qui aurait souhaité rester un moldu pour toujours, rien n’avait d’intérêts. Le petit avait entendu parler de la cruauté des hommes par ses parents pourtant, il restait persuadé qu’une part de bonté subsistait dans chaque cœur… Hérésie pure d’un cœur d’enfant.

« 7, 8, 9 Mais… »

Tient, quelle était la rime déjà ? Fouillant dans sa mémoire, l’australien se rendit compte avec surprise qu’il n’arrivait plus à s’en souvenir. Cette comptine, il l’avait pourtant récité tant de fois…Changeant de pied, il se concentra un peu plus, continuant à sauter en fredonnant quelques instants. Ce ne fut que lorsqu’il entendit un bruit derrière lui, signalant la présence de quelqu’un, qu’il s’arrêta enfin de sauter à la corde. Ce fut comme un instant de panique, avant même qu’il ne se retourne, la pensée que ce soit un grand qui lui confisquerait son objet favori le traversa. Ainsi, il ferma les yeux et cacha sa corde derrière son dos de manière maladroite. Pitié qu’on n’y touche pas… C’était tout ce qu’il désirait…

« Je suis désolé, je suis désolé ! »

Pourquoi s’excusait-il ? Pour avoir jouer comme quelqu’un de son âge ? Pour avoir un objet moldu à l’école ? Mais dans quel monde vivait-il ? Tout les enfants ont le droit de jouer, c’est normal… On ne devrait jamais les punir comme ça. Mais Abby avait si peur que cette pensée ne lui avait même pas traversée l’esprit.